Savons-nous coopérer ?

Pour répondre à cette question, je vous propose d’emprunter le chemin de l’analogie et de faire un détour par une activité humaine physique, savons-nous sauter ?

La réponse est évidente : oui nous savons sauter. C’est tellement naturel que nous n’y pensons pas, et d’ailleurs nous ne nous posons pas la question ! Nous avons appris à sauter peu de temps après avoir appris à marcher. Nous nous souvenons du plaisir que nous prenions à sauter à pieds joints dans les flaques d’eau, notre enchantement du moment n’étant pas toujours partagé par nos parents.

De la même façon, nous savons coopérer. Nous l’avons appris à l’école, dans notre famille, à travers nos loisirs ou nos pratiques sportives, éventuellement pendant nos études. De là à conclure que la coopération s’apprend toute seule par la pratique, il n’y a qu’un saut.

Bien sûr, nous sommes tous différents et certains d’entre nous ont plus ou moins de facilités et d’aisance dans cette activité sociale, mais globalement, nous faisons avec les moyens du bord, et on avance.

Mais à y regarder plus attentivement, est-ce aussi évident que ça en à l’air ?
Un élément est souvent oublié : le contexte. La réponse à notre question « savons-nous coopérer ? » n’a de sens que dans un certain contexte. Poursuivons notre détour.

2016 est une année olympique et imaginons un instant que votre boss vous propose de participer aux jeux Olympiques de Rio. Il vous propose de choisir parmi trois épreuves : le saut en longueur, le saut en hauteur, ou le triple saut. D’un naturel optimiste, vous ne vous démontez pas et vous vous précipitez sur wikipedia pour voir ce que ça veut dire concrètement : record olympique du triple saut 18,09m, du saut en longueur 8,9m, du saut en hauteur 2,39m.

Et là, vous prenez la mesure de la situation : vous savez sauter, oui, bien sûr, mais pas à ce niveau de performance.

Que tirer de ce détour pour éclairer notre question du moment : oui nous savons coopérer, mais savons-nous le faire à un niveau de performance élevé ?
Après dix ans d’accompagnement des organisations, et après avoir appris à le faire, il me semble évident que nous ne savons pas « naturellement » coopérer avec un haut niveau de performance. Sauter dans les flaques d’eau est une chose, sauter au championnat d’athlétisme local en est une autre, et sauter aux jeux olympiques encore une autre. Nombre de difficultés dans les organisations sont induites par le fait que l’on demande aux personnes de travailler ensemble dans un contexte de performance très élevée sans leur apprendre à le faire. La performance olympique nécessite des gestes techniques précis, qui ne sont pas intuitifs.

De la même façon travailler à plusieurs avec une logique de performance (délais, innovation, créativité, rendement…) dans un environnement complexe et exigeant demande des techniques précises pour permettre à un groupe d’atteindre des objectifs élevés.
Alors pour ceux qui rêvent de Rio, je vous donne rendez-vous pour d’autres billets sur notre blog.

Laurent Stoffel